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 Bienheureux « Saint » Dycat

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AuteurMessage
Richelieu1
Cardinal Archevêque d'Aix-en-Provence
Richelieu1


Lieu RP : Brignoles

Feuille de personnage
Nom et prénom: Ludovi de Sabran
Paroisse: Brignoles

Bienheureux « Saint » Dycat Empty
MessageSujet: Bienheureux « Saint » Dycat   Bienheureux « Saint » Dycat EmptyDim 3 Avr 2011 - 23:56

Citation :
Bienheureux « Saint » Dycat Badgesaintofficenc8
les Bienheureux - Bienheureux « Saint » Dycat


Le jeune Dycat naquit en l’an 526 aux environs de Moustiers en Tarentaise. Ses parents, païens, étaient mineurs depuis des temps immémoriaux et habitaient une modeste maisonnette mise à leur disposition par le propriétaire de la mine, un certain Guilhem d’Orbessan, qui était, lui, aristotélicien mais n’affichait guère que des convictions de façade. La mère de Dycat mourut en couches alors qu’il n’avait qu’un an et demi ; il vécut ensuite seul avec son père.
La vie, en ces temps reculés, était extrêmement rude pour les mineurs, plus encore que de nos jours, et le père du jeune Dycat ne manquait jamais une occasion de critiquer ce « chien d’aristotélicien de Guilhem qui les exploitait jusqu’à la moelle ». D’Orbessan était en effet un tyran, exigeant toujours plus de ses ouvriers afin de parvenir à monter une milice privée destinée à attaquer les convois des sociétés minières concurrentes, mais le père de Dycat mettait à tort cette cruauté sur le compte de sa « mauvaise » orientation religieuse. Le jeune Dycat, comme tous les enfants de son âge, crut son unique parent encore vivant sur parole et il fut bientôt très clair dans son esprit qu’aristotélicien = mauvais.

À sept ans, Dycat dût commencer à travailler à la mine. La plupart des autres enfants ne commençaient à travailler qu’à l’âge de dix ans, mais le père de Dycat avait de plus en plus de difficultés à acheter les deux épis de maïs que lui et son fils se partageaient chaque jour ; aussi résolut-il, malgré son appréhension, à convaincre d’Orbessan d’embaucher son jeune fils comme apprenti. Guilhem, considérant qu’un brouette poussée par un enfant transporte autant de gravats qu’une brouette poussée par un adulte, accepta.
C’est alors que Dycat se rendit compte que son père avait pleinement raison sur le compte d’Orbessan, et qu’il était même en-dessous de la réalité. Dycat n’avait que sept ans mais possédait déjà une grande faculté d’empathie et avait très bien saisi le noirceur de l’âme du tyran ; le problème est que Dycat, guidé par les actions de son père, était plus convaincu à chaque mauvais coup de Guilhem que cette cruauté devait être imputée à l’aristotélisme de celui-ci. Il était loin de se douter que d’Orbessan n’était absolument pas pratiquant et s’était converti récemment à l’aristotélisme dans le seul but de gravir les échelons dans la société qui commençait à s’aristotéliser de plus en plus. Toujours est-il que le jeune Dycat conçut une haine féroce contre l’aristotélisme, qu’il considéra très rapidement comme une croyance encourageant à la cruauté. Cette situation de haine croissante devait durer cinq années durant lesquelles Dycat se tua à la tâche afin de permettre à son père et à lui-même de subsister.

Peu de temps après son douzième anniversaire, Dycat vit un grand bouleversement arriver dans sa vie. L’hiver avait été particulièrement rude cette année, et le père de Dycat, ainsi que d’autres mineurs parmi les plus âgés, avait été très sérieusement affaibli. Au milieu du mois de février, après trois mois de gel presque constant, les vents devinrent plus forts et plus froids, ce qui eut un effet désastreux sur la santé du père de Dycat, déjà fort affaiblie par le travail harassant à la mine et les trois mois de lutte contre le froid. Le 17 février au matin, le père de Dycat gisait, inerte, sur sa couche : le froid l’avait engourdi au-delà du dicible. Il fallut une heure à Dycat pour rendre à son père un semblant de vie, mais le vieil homme était attendu, comme tous les jours, pour le travail à la mine. Dycat, persuadé que Guilhem, fidèle à sa cupidité habituelle, préférerait accorder une journée de vacance plutôt que de risquer de perdre un travailleur compétent. Il prévint son père de ses desseins et alla trouver Guilhem dans cet esprit. Il essuya un refus catégorique : d’Orbessan prétendait que son père stimulait et le menaçait de le licencier s’il ne venait pas travailler ce jour-là.

Dycat, trop abasourdi par cette attitude absurde pour être révolté, revint annoncer la nouvelle à son père qui, bien qu’il était désormais en proie à des fortes fièvres, dut se rendre à la mine. C’est alors que le drame survint. Un éboulement, comme cela se produisait fréquemment, eut lieu. Mais le père de Dycat, complètement paralysé par son mal et rendu moins réactif par les ans, ne parvint pas à se mettre à l’abri à temps. Le jeune Dycat assista, impuissant, au spectacle de son père se faisant ensevelir sous une montagne de gravats. D’Orbessan, à la fois inquiet de la mauvaise réputation qu’un décès dans une de ses mines pourrait lui causer et soucieux de déblayer le conduit rapidement afin de poursuivre les travaux, ordonna que l’on fasse tout pour rapidement tirer le père de Dycat de dessous les gravats. Malgré tout l’acharnement des mineurs, il fallut presque une heure pour que ce fut chose faite. Quand on parvint à extraire son corps, le père de Dycat était vivant et conscient, bien que défiguré et incapable du moindre mouvement. On le transporta dans sa cabane où on le laissa en compagnie de Dycat. C’est là que la haine de l’adolescent éclata. Il arpentait la cabane en jurant à son père qu’il le vengerait, qu’il allait passer Guilhem par le fil de l’épée. Son père, sans doute encore plus inquiet que son fils ne mette ses projets à exécution que pour sa propre survie, l’envoya en ville chercher les services d’un apothicaire. Il était sans doute loin de se douter des conséquences que cet envoi aurait.

Moustiers était, comme aujourd’hui d’ailleurs, le siège archiépiscopal de la province de Tarentaise ; ce qui impliquait qu’il n’était pas rare de voir de hauts dignitaires ecclésiastiques en ville. Dieu, dans Son impénétrable génie, avait décidé que l’archevêque de Tarentaise lui-même serait présent dans la boutique de l’apothicaire chez qui Dycat se rendit. Le jeune homme avait, tout le long du trajet entre la mine et la ville, juré de venger son père en immolant Guilhem et en menant la vie dure à tous les aristotéliciens, qu’il voyait comme responsables indirects de l’accident. Aussi, quand il entra dans la boutique de l’apothicaire et qu’il vit un homme en habits ecclésiastiques, son sang ne fit qu’un tour : il se rua sur l’archevêque et le roua de coups. Il fut violemment maîtrisé par les gardes épiscopaux qui le jetèrent sans cérémonie dans les geôles du palais archiépiscopal. Le jeune Dycat commençait déjà à regretter son acte : par sa stupidité, il allait maintenant moisir dans ces geôles immondes pendant que la vie quittait peu à peu le corps de son père. Le remords le rongeait, mais absolument pas pour ce qu’il avait fait subir à l’archevêque ; dans son esprit, ce que l’homme d’Église avait subi (il ignorait le rang de celui à qui il s’en était pris) était parfaitement justifié, il espérait qu’il souffre un maximum : il ne regrettait que les conséquences que son acte pourrait avoir sur la santé de son père.

Deux jours après ces évènements, la porte du cachot s’ouvrit. Les hypothèses défilaient dans la tête de Dycat : venait-on le chercher pour le juger, ou bien allait-on l’assassiner discrètement ? Ou peut-être allait-on le libérer ? Mais rien de tout cela ne se produisit : l’adolescent fut bien surpris de voir pénétrer dans sa cellule l’homme qu’il avait agressé. L’archevêque congédia les gardes et expliqua très posément à Dycat qu’il venait ici afin de connaître les motivations de son acte avant de prendre une décision le concernant. Dycat, pris de cours par une telle transparence et un tel soucis de la justice, fut entièrement désemparé et ne vit pas d’autre solution que de raconter toute la vérité à l’archevêque. S’ensuivit un long silence pendant lequel l’archevêque réfléchit. Après cet instant de réflexion, il demanda à Dycat des détails sur l’état de santé de son père, ce qui troubla encore un peu plus l’adolescent. Il expliqua à l’archevêque qu’il était au plus mal lorsqu’il le quitta et que, resté seul à la mine, il ne pouvait que se porter plus mal et qu’il était même à craindre qu’il ne soit plus en vie. L’archevêque, cette fois, réagit rapidement : il intima à Dycat l’ordre de le suivre. À la plus grande surprise de l’adolescent, l’archevêque manda son apothicaire personnel afin qu’il soigne le père de Dycat et, en quelques minutes à peine, Dycat se trouva dans la calèche de l’archevêque, accompagné par l’apothicaire et escorté par des gardes épiscopaux.

Tout se bousculait dans l’esprit de Dycat. Comme la sincérité semblait réussir avec l’archevêque, il lui expliqua qu’il ne comprenait pas comment un homme aussi bon que lui pouvait être aristotélicien. Cette demande fit rire l’archevêque, lequel, son hilarité passée, lui demanda pourquoi cela le surprenait tant. Dycat lui dit que tous les aristotéliciens qu’il connaissait étaient mauvais, suite à quoi l’archevêque lui demanda de lui parler des aristotéliciens qu’il connaissait. Dycat lui parla d’Orbessan et de ses mauvaises actions. L’archevêque hocha la tête et, penseur, lui demanda de lui parler des autres aristotéliciens qu’il connaissait. Dycat répondit qu’il n’en connaissait pas d’autre. L’archevêque s’en étonna, car Dycat avait parlé de plusieurs personnes. Le jeune bienheureux, une nouvelle fois pris de court, ne sut que répondre. L’archevêque lui tint alors ces paroles qui allaient marquer un tournant dans sa vie : « Vois-tu, mon fils, tu viens là de commettre une erreur commune : parce qu’une personne de telle croyance est un être que tu juges mauvais, tu conclus que tous ceux qui partagent ses croyances agissent comme lui. C’est une erreur que beaucoup de personnes commettent, et qui est commise par nombre d’aristotéliciens, envers les spinozistes ou les averroïstes, par exemple. En fait, il y a autant de manière de vivre la foi que de croyants. L’important est de ne faire aucun amalgame. Vois-tu, si je n’avais, à ton instar, pas voulu voir plus loin que le bout de mon nez, à l’heure qu’il est tu serais toujours à moisir dans une des geôles du palais archiépiscopal pendant que la vie quitte peu à peu le corps de ton père. » Ces paroles furent à la base de la révélation que Dycat vécut ce jour-là.

Arrivés à la mine où la venue d’un haut prélat fit grand bruit, l’archevêque, accompagné de son apothicaire et de Dycat, se rendit immédiatement à la cabane du jeune bienheureux. Le vieil homme souffreteux, déjà résolu à mourir, crut avoir un mirage en voyant son fils revenir avec un homme si richement vêtu. Son affaiblissement était tel qu’il ne se rendait pas compte qu’il avait affaire avec un haut prélat de l’Église aristotélicienne. Le diagnostic de l’apothicaire fut sans appel : s’il restait dans cette cabane de misère avec si peu de soins à sa disposition et avec une nourriture d’une si mauvaise qualité, le père de Dycat ne passerait pas la nuit. Ce n’est qu’en mettant sa bague épiscopale sous le nez de Guilhem que l’archevêque parvint à convaincre ce dernier de le laisser embarquer Dycat et son père pour le palais archiépiscopal. Le temps du trajet, le père de Dycat comprit qui était l’homme tellement influent pour arriver à l’arracher des griffes de Guilhem, mais le diagnostic de mort imminente faute de soins l’emporta sur son aversion pour l’aristotélisme. Au bout de trois jours, à force de soins, de repos et de nourriture de qualité supérieure, le père de Dycat vit son état s’améliorer grandement. Une semaine plus tard, il était sauvé. Durant tout ce temps passé au palais archiépiscopal, il eut de nombreux dialogues avec l’archevêque. Avant de retourner à la mine, il prit à part son fils et lui confia ses impressions sur l’archevêque, impressions que Dycat partageait sans oser l’avouer à son père. Le miraculé expliqua à son fils ce que l’archevêque avait déjà dit au jeune bienheureux, et lui enjoignit de ne jamais commettre la même erreur que lui. L’archevêque raccompagna Dycat et son père à la mine et, avant de les quitter, proposa au jeune bienheureux de se faire baptiser et d’entreprendre un séminaire, chose que Dycat accepta de tout son cœur.

Dix années s’écoulèrent. Dycat était maintenant un robuste jeune homme de vingt-deux ans. Il avait terminé avec brio ses études au séminaire et se rendait à la messe tous les dimanches. Il avait refusé toutes les propositions de travail au palais archiépiscopal que l’archevêque lui avait faites : il voulait rester travailler à la mine. Cette volonté était justifiée par deux raisons. Tout d’abord, Dycat n’aurait jamais pu s’épanouir en sachant qu’il laissait son père là-bas. Ensuite, bien que le travail fût harassant et peu gratifiant, le jeune bienheureux s’était trouvé une autorité à la mine : il essayait, appliquant parfaitement les leçons dispensées durant son séminaire, d’expliquer aux mineurs que l’aristotélisme était la seule vraie religion et qu’ils ne devaient pas se laisser influencer par le mauvais exemple d’aristotélicien que leur offrait d’Orbessan. Dycat avait, pour les convaincre, un argument de poids : le fait que Christos ait pris explicitement leur défense devant Ponce Pilate. Cet argument était extrêmement convaincant, et nombre de mineurs se convertirent, pour la plus grande satisfaction de l’archevêque de Moustiers.
Une journée de juin 548, le principal client de Guilhem passa une immense commande. Fidèle à sa réputation, l’infect homme exigea de ses mineurs une surcharge de travail considérable sans aucune compensation salariale, ce qui sema un parfum de révolte parmi les mineurs qui, au contact de l’aristotélisme, commençaient à ouvrir les yeux, Dycat le premier. Arriva alors un drame : le père de Dycat fut à nouveau pris dans un éboulement. D’Orbessan, se focalisant sur le profit, ordonna aux mineurs de continuer à travailler, arguant qu’ils auraient le temps de le déblayer une fois la commande honorée. Dycat, soutenu par l’entièreté des mineurs aristotéliciens, répliqua qu’il était hors de question de risquer de laisser son père mourir d’asphyxie ou de soif. D’Orbessan tenta d’étouffer la révolte dans l’œuf en menaçant les mineurs de renvoi immédiat s’ils n’obtempéraient pas. Mais il était trop tard. Sous l’impulsion de Dycat et des autres mineurs aristotéliciens, l’ensemble des travailleurs se révolta contre la tyrannie oppressante de Guilhem et réclamèrent un salaire à dix-sept écus tel que l'avait prôné Christos. D’Orbessan, craignant à juste titre que les mineurs le renversent, ordonna sur-le-champ à son contremaître de procéder à des opérations destinées à calmer les foules : supprimer les meneurs. C’est ainsi que Dycat fut froidement assassiné, à la sauvette, et à la vue de tous. Cette action, loin d’apaiser les mineurs, eut l’effet inverse : leur fureur fut décuplée et il fallut toute l’influence de l’archevêque, descendu sur le terrain car inquiet de la situation, pour les calmer. Se moquant à présent des ordres de Guilhem, ils réussirent à tirer des décombres le père de Dycat ; mais ils eurent à lui apprendre que son fils était mort. D’Orbessan fut chassé et un nouvel entrepreneur, aristotélicien et honnête, prit sa place. Les conditions de travail des mineurs de Moustiers s’en améliorèrent de même.

Mais le sacrifice de Dycat n’avait pas été vain : le bruit du jeune mineur aristotélicien et défendeur des faibles travailleurs devant le patron tout-puissant s’était répandu dans toute la province, grâce à l'action conjointe de son père et de l'archevêque, si bien que Dycat fut bientôt un modèle et un symbole d’espérance pour les mineurs et les travailleurs faibles en général.
Le très saint cénacle du Saint-Office romain, dans son immense sagesse, prêtant toujours oreille aux doléances de tous, fût-ce des plus faibles, décida de béatifier « saint » Dycat, qui devint dès lors bienheureux.

Reliques : Le cœur ainsi que des fragments d'os de « saint » Dycat sont conservés en la cathédrale de Moustiers en Tarentaise.

Code:
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[color=black]Le jeune Dycat naquit en l’an 526 aux environs de Moustiers en Tarentaise. Ses parents, païens, étaient mineurs depuis des temps immémoriaux et habitaient une modeste maisonnette mise à leur disposition par le propriétaire de la mine, un certain Guilhem d’Orbessan, qui était, lui, aristotélicien mais n’affichait guère que des convictions de façade. La mère de Dycat mourut en couches alors qu’il n’avait qu’un an et demi ; il vécut ensuite seul avec son père.
La vie, en ces temps reculés, était extrêmement rude pour les mineurs, plus encore que de nos jours, et le père du jeune Dycat ne manquait jamais une occasion de critiquer ce « chien d’aristotélicien de Guilhem qui les exploitait jusqu’à la moelle ». D’Orbessan était en effet un tyran, exigeant toujours plus de ses ouvriers afin de parvenir à monter une milice privée destinée à attaquer les convois des sociétés minières concurrentes, mais le père de Dycat mettait à tort cette cruauté sur le compte de sa « mauvaise » orientation religieuse. Le jeune Dycat, comme tous les enfants de son âge, crut son unique parent encore vivant sur parole et il fut bientôt très clair dans son esprit qu’aristotélicien = mauvais.

À sept ans, Dycat dût commencer à travailler à la mine. La plupart des autres enfants ne commençaient à travailler qu’à l’âge de dix ans, mais le père de Dycat avait de plus en plus de difficultés à acheter les deux épis de maïs que lui et son fils se partageaient chaque jour ; aussi résolut-il, malgré son appréhension, à convaincre d’Orbessan d’embaucher son jeune fils comme apprenti. Guilhem, considérant qu’un brouette poussée par un enfant transporte autant de gravats qu’une brouette poussée par un adulte, accepta.
C’est alors que Dycat se rendit compte que son père avait pleinement raison sur le compte d’Orbessan, et qu’il était même en-dessous de la réalité. Dycat n’avait que sept ans mais possédait déjà une grande faculté d’empathie et avait très bien saisi le noirceur de l’âme du tyran ; le problème est que Dycat, guidé par les actions de son père, était plus convaincu à chaque mauvais coup de Guilhem que cette cruauté devait être imputée à l’aristotélisme de celui-ci. Il était loin de se douter que d’Orbessan n’était absolument pas pratiquant et s’était converti récemment à l’aristotélisme dans le seul but de gravir les échelons dans la société qui commençait à s’aristotéliser de plus en plus. Toujours est-il que le jeune Dycat conçut une haine féroce contre l’aristotélisme, qu’il considéra très rapidement comme une croyance encourageant à la cruauté. Cette situation de haine croissante devait durer cinq années durant lesquelles Dycat se tua à la tâche afin de permettre à son père et à lui-même de subsister.

Peu de temps après son douzième anniversaire, Dycat vit un grand bouleversement arriver dans sa vie. L’hiver avait été particulièrement rude cette année, et le père de Dycat, ainsi que d’autres mineurs parmi les plus âgés, avait été très sérieusement affaibli. Au milieu du mois de février, après trois mois de gel presque constant, les vents devinrent plus forts et plus froids, ce qui eut un effet désastreux sur la santé du père de Dycat, déjà fort affaiblie par le travail harassant à la mine et les trois mois de lutte contre le froid. Le 17 février au matin, le père de Dycat gisait, inerte, sur sa couche : le froid l’avait engourdi au-delà du dicible. Il fallut une heure à Dycat pour rendre à son père un semblant de vie, mais le vieil homme était attendu, comme tous les jours, pour le travail à la mine. Dycat, persuadé que Guilhem, fidèle à sa cupidité habituelle, préférerait accorder une journée de vacance plutôt que de risquer de perdre un travailleur compétent. Il prévint son père de ses desseins et alla trouver Guilhem dans cet esprit. Il essuya un refus catégorique : d’Orbessan prétendait que son père stimulait et le menaçait de le licencier s’il ne venait pas travailler ce jour-là.

Dycat, trop abasourdi par cette attitude absurde pour être révolté, revint annoncer la nouvelle à son père qui, bien qu’il était désormais en proie à des fortes fièvres, dut se rendre à la mine. C’est alors que le drame survint. Un éboulement, comme cela se produisait fréquemment, eut lieu. Mais le père de Dycat, complètement paralysé par son mal et rendu moins réactif par les ans, ne parvint pas à se mettre à l’abri à temps. Le jeune Dycat assista, impuissant, au spectacle de son père se faisant ensevelir sous une montagne de gravats. D’Orbessan, à la fois inquiet de la mauvaise réputation qu’un décès dans une de ses mines pourrait lui causer et soucieux de déblayer le conduit rapidement afin de poursuivre les travaux, ordonna que l’on fasse tout pour rapidement tirer le père de Dycat de dessous les gravats. Malgré tout l’acharnement des mineurs, il fallut presque une heure pour que ce fut chose faite. Quand on parvint à extraire son corps, le père de Dycat était vivant et conscient, bien que défiguré et incapable du moindre mouvement. On le transporta dans sa cabane où on le laissa en compagnie de Dycat. C’est là que la haine de l’adolescent éclata. Il arpentait la cabane en jurant à son père qu’il le vengerait, qu’il allait passer Guilhem par le fil de l’épée. Son père, sans doute encore plus inquiet que son fils ne mette ses projets à exécution que pour sa propre survie, l’envoya en ville chercher les services d’un apothicaire. Il était sans doute loin de se douter des conséquences que cet envoi aurait.

Moustiers était, comme aujourd’hui d’ailleurs, le siège archiépiscopal de la province de Tarentaise ; ce qui impliquait qu’il n’était pas rare de voir de hauts dignitaires ecclésiastiques en ville. Dieu, dans Son impénétrable génie, avait décidé que l’archevêque de Tarentaise lui-même serait présent dans la boutique de l’apothicaire chez qui Dycat se rendit. Le jeune homme avait, tout le long du trajet entre la mine et la ville, juré de venger son père en immolant Guilhem et en menant la vie dure à tous les aristotéliciens, qu’il voyait comme responsables indirects de l’accident. Aussi, quand il entra dans la boutique de l’apothicaire et qu’il vit un homme en habits ecclésiastiques, son sang ne fit qu’un tour : il se rua sur l’archevêque et le roua de coups. Il fut violemment maîtrisé par les gardes épiscopaux qui le jetèrent sans cérémonie dans les geôles du palais archiépiscopal. Le jeune Dycat commençait déjà à regretter son acte : par sa stupidité, il allait maintenant moisir dans ces geôles immondes pendant que la vie quittait peu à peu le corps de son père. Le remords le rongeait, mais absolument pas pour ce qu’il avait fait subir à l’archevêque ; dans son esprit, ce que l’homme d’Église avait subi (il ignorait le rang de celui à qui il s’en était pris) était parfaitement justifié, il espérait qu’il souffre un maximum : il ne regrettait que les conséquences que son acte pourrait avoir sur la santé de son père.

Deux jours après ces évènements, la porte du cachot s’ouvrit. Les hypothèses défilaient dans la tête de Dycat : venait-on le chercher pour le juger, ou bien allait-on l’assassiner discrètement ? Ou peut-être allait-on le libérer ? Mais rien de tout cela ne se produisit : l’adolescent fut bien surpris de voir pénétrer dans sa cellule l’homme qu’il avait agressé. L’archevêque congédia les gardes et expliqua très posément à Dycat qu’il venait ici afin de connaître les motivations de son acte avant de prendre une décision le concernant. Dycat, pris de cours par une telle transparence et un tel soucis de la justice, fut entièrement désemparé et ne vit pas d’autre solution que de raconter toute la vérité à l’archevêque. S’ensuivit un long silence pendant lequel l’archevêque réfléchit. Après cet instant de réflexion, il demanda à Dycat des détails sur l’état de santé de son père, ce qui troubla encore un peu plus l’adolescent. Il expliqua à l’archevêque qu’il était au plus mal lorsqu’il le quitta et que, resté seul à la mine, il ne pouvait que se porter plus mal et qu’il était même à craindre qu’il ne soit plus en vie. L’archevêque, cette fois, réagit rapidement : il intima à Dycat l’ordre de le suivre. À la plus grande surprise de l’adolescent, l’archevêque manda son apothicaire personnel afin qu’il soigne le père de Dycat et, en quelques minutes à peine, Dycat se trouva dans la calèche de l’archevêque, accompagné par l’apothicaire et escorté par des gardes épiscopaux.

Tout se bousculait dans l’esprit de Dycat. Comme la sincérité semblait réussir avec l’archevêque, il lui expliqua qu’il ne comprenait pas comment un homme aussi bon que lui pouvait être aristotélicien. Cette demande fit rire l’archevêque, lequel, son hilarité passée, lui demanda pourquoi cela le surprenait tant. Dycat lui dit que tous les aristotéliciens qu’il connaissait étaient mauvais, suite à quoi l’archevêque lui demanda de lui parler des aristotéliciens qu’il connaissait. Dycat lui parla d’Orbessan et de ses mauvaises actions. L’archevêque hocha la tête et, penseur, lui demanda de lui parler des autres aristotéliciens qu’il connaissait. Dycat répondit qu’il n’en connaissait pas d’autre. L’archevêque s’en étonna, car Dycat avait parlé de plusieurs personnes. Le jeune bienheureux, une nouvelle fois pris de court, ne sut que répondre. L’archevêque lui tint alors ces paroles qui allaient marquer un tournant dans sa vie : « Vois-tu, mon fils, tu viens là de commettre une erreur commune : parce qu’une personne de telle croyance est un être que tu juges mauvais, tu conclus que tous ceux qui partagent ses croyances agissent comme lui. C’est une erreur que beaucoup de personnes commettent, et qui est commise par nombre d’aristotéliciens, envers les spinozistes ou les averroïstes, par exemple. En fait, il y a autant de manière de vivre la foi que de croyants. L’important est de ne faire aucun amalgame. Vois-tu, si je n’avais, à ton instar, pas voulu voir plus loin que le bout de mon nez, à l’heure qu’il est tu serais toujours à moisir dans une des geôles du palais archiépiscopal pendant que la vie quitte peu à peu le corps de ton père. » Ces paroles furent à la base de la révélation que Dycat vécut ce jour-là.

Arrivés à la mine où la venue d’un haut prélat fit grand bruit, l’archevêque, accompagné de son apothicaire et de Dycat, se rendit immédiatement à la cabane du jeune bienheureux. Le vieil homme souffreteux, déjà résolu à mourir, crut avoir un mirage en voyant son fils revenir avec un homme si richement vêtu. Son affaiblissement était tel qu’il ne se rendait pas compte qu’il avait affaire avec un haut prélat de l’Église aristotélicienne. Le diagnostic de l’apothicaire fut sans appel : s’il restait dans cette cabane de misère avec si peu de soins à sa disposition et avec une nourriture d’une si mauvaise qualité, le père de Dycat ne passerait pas la nuit. Ce n’est qu’en mettant sa bague épiscopale sous le nez de Guilhem que l’archevêque parvint à convaincre ce dernier de le laisser embarquer Dycat et son père pour le palais archiépiscopal. Le temps du trajet, le père de Dycat comprit qui était l’homme tellement influent pour arriver à l’arracher des griffes de Guilhem, mais le diagnostic de mort imminente faute de soins l’emporta sur son aversion pour l’aristotélisme. Au bout de trois jours, à force de soins, de repos et de nourriture de qualité supérieure, le père de Dycat vit son état s’améliorer grandement. Une semaine plus tard, il était sauvé. Durant tout ce temps passé au palais archiépiscopal, il eut de nombreux dialogues avec l’archevêque. Avant de retourner à la mine, il prit à part son fils et lui confia ses impressions sur l’archevêque, impressions que Dycat partageait sans oser l’avouer à son père. Le miraculé expliqua à son fils ce que l’archevêque avait déjà dit au jeune bienheureux, et lui enjoignit de ne jamais commettre la même erreur que lui. L’archevêque raccompagna Dycat et son père à la mine et, avant de les quitter, proposa au jeune bienheureux de se faire baptiser et d’entreprendre un séminaire, chose que Dycat accepta de tout son cœur.

Dix années s’écoulèrent. Dycat était maintenant un robuste jeune homme de vingt-deux ans. Il avait terminé avec brio ses études au séminaire et se rendait à la messe tous les dimanches. Il avait refusé toutes les propositions de travail au palais archiépiscopal que l’archevêque lui avait faites : il voulait rester travailler à la mine. Cette volonté était justifiée par deux raisons. Tout d’abord, Dycat n’aurait jamais pu s’épanouir en sachant qu’il laissait son père là-bas. Ensuite, bien que le travail fût harassant et peu gratifiant, le jeune bienheureux s’était trouvé une autorité à la mine : il essayait, appliquant parfaitement les leçons dispensées durant son séminaire, d’expliquer aux mineurs que l’aristotélisme était la seule vraie religion et qu’ils ne devaient pas se laisser influencer par le mauvais exemple d’aristotélicien que leur offrait d’Orbessan. Dycat avait, pour les convaincre, un argument de poids : le fait que Christos ait pris explicitement leur défense devant Ponce Pilate. Cet argument était extrêmement convaincant, et nombre de mineurs se convertirent, pour la plus grande satisfaction de l’archevêque de Moustiers.
Une journée de juin 548, le principal client de Guilhem passa une immense commande. Fidèle à sa réputation, l’infect homme exigea de ses mineurs une surcharge de travail considérable sans aucune compensation salariale, ce qui sema un parfum de révolte parmi les mineurs qui, au contact de l’aristotélisme, commençaient à ouvrir les yeux, Dycat le premier. Arriva alors un drame : le père de Dycat fut à nouveau pris dans un éboulement. D’Orbessan, se focalisant sur le profit, ordonna aux mineurs de continuer à travailler, arguant qu’ils auraient le temps de le déblayer une fois la commande honorée. Dycat, soutenu par l’entièreté des mineurs aristotéliciens, répliqua qu’il était hors de question de risquer de laisser son père mourir d’asphyxie ou de soif. D’Orbessan tenta d’étouffer la révolte dans l’œuf en menaçant les mineurs de renvoi immédiat s’ils n’obtempéraient pas. Mais il était trop tard. Sous l’impulsion de Dycat et des autres mineurs aristotéliciens, l’ensemble des travailleurs se révolta contre la tyrannie oppressante de Guilhem et réclamèrent un salaire à dix-sept écus tel que l'avait prôné Christos. D’Orbessan, craignant à juste titre que les mineurs le renversent, ordonna sur-le-champ à son contremaître de procéder à des opérations destinées à calmer les foules : supprimer les meneurs. C’est ainsi que Dycat fut froidement assassiné, à la sauvette, et à la vue de tous. Cette action, loin d’apaiser les mineurs, eut l’effet inverse : leur fureur fut décuplée et il fallut toute l’influence de l’archevêque, descendu sur le terrain car inquiet de la situation, pour les calmer. Se moquant à présent des ordres de Guilhem, ils réussirent à tirer des décombres le père de Dycat ; mais ils eurent à lui apprendre que son fils était mort. D’Orbessan fut chassé et un nouvel entrepreneur, aristotélicien et honnête, prit sa place. Les conditions de travail des mineurs de Moustiers s’en améliorèrent de même.

Mais le sacrifice de Dycat n’avait pas été vain : le bruit du jeune mineur aristotélicien et défendeur des faibles travailleurs devant le patron tout-puissant s’était répandu dans toute la province, grâce à l'action conjointe de son père et de l'archevêque, si bien que Dycat fut bientôt un modèle et un symbole d’espérance pour les mineurs et les travailleurs faibles en général.
Le très saint cénacle du Saint-Office romain, dans son immense sagesse, prêtant toujours oreille aux doléances de tous, fût-ce des plus faibles, décida de béatifier « saint » Dycat, qui devint dès lors bienheureux.

[b]Reliques :[/b] Le cœur ainsi que des fragments d'os de « saint » Dycat sont conservés en la cathédrale de Moustiers en Tarentaise.[/color][/quote]
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Bienheureux « Saint » Dycat
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